Tramway en rocade sud de Paris : halte aux idées reçues !

À l’occasion du Conseil de Paris du 29 janvier 2001, les élus de la Capitale s’exprimeront quant au projet d’implantation d’un tramway en rocade sud de Paris entre le Boulevard Victor et la Porte d’Ivry, thème récurent de la campagne électorale actuelle à Paris. Un pseudo consensus semble s’être instauré autour de l’implantation de ce tramway sur les boulevards des Maréchaux. Un retour sur la genèse de ce projet s’impose...

En effet, à l’issue de la rencontre du 2 octobre 1995, entre le Ministre chargé des transports et le Maire de Paris, le Syndicat des Transports Parisiens (devenu STIF -Syndicat des Transports d’Ile de France- en décembre 2000), en sa qualité d’autorité organisatrice des transports publics en Ile-de-France, s’est vu confier la mission de piloter l’étude de la création d’une ligne de tramway en rocade sud de Paris. Un groupe de travail associant les différents organismes a entrepris l’examen de deux solutions à priori envisageable : implantation sur la Petite Ceinture ferroviaire Sud (ce tronçon de la ligne ne connaît pas de trafic régulier actuellement) ou sur les boulevards des Maréchaux. Le rapport final de l’étude de ce groupe de travail intitulée « Création d’une ligne de tramway en rocade sud de Paris » a été rendu publique par le Syndicat des Transports Parisiens (Direction des Investissements / note DR 1235) en octobre 1998.

Une lecture attentive de ce rapport fait ressortir que l’on ne peut que s’étonner du choix du principe de construire une infrastructure de transport sur les boulevards des Maréchaux voisins. Cette étude officielle montre, en effet, que la ligne ferroviaire de Petite Ceinture SNCF/RFF présente inéluctablement des attraits supérieurs à la solution « boulevard des Maréchaux ».

Ainsi, de boulevard Victor à Porte d’Ivry (7, 7 km sur la Petite Ceinture ferroviaire et 7.9 km sur les Maréchaux) :

* Le temps de parcours serait de 17 minutes pour la solution « Petite Ceinture ferroviaire » contre 24 à 32 minutes sur les Maréchaux ( selon le niveau de priorité aux carrefours) ;

* La vitesse commerciale serait de 28 km/h sur la Petite Ceinture ferroviaire et seulement de 15 à 20 km/h sur les Maréchaux ;

* Le nombre d’utilisateurs à la pointe du matin serait de 17000 à l’heure sur la Petite Ceinture ferroviaire (en sachant qu’il s’agirait du prolongement de la ligne de tramway T2 la Défense, Issy Val de Seine), tandis que sur les Maréchaux, dans le cas du prolongement du T2, ce nombre serait de 10400 à 12500 et, dans le cas d’une ligne qui ne serait pas reliée au T2, il chuterait et se situerait autour de 7700 à 9100 voyageurs par heure (selon le niveau de priorité aux carrefours) ;

* Le coût total estimé d’un tramway sur la Petite Ceinture ferroviaire entre Bd Victor et Porte d’Ivry est de 1770 Millions de francs H.T aux conditions économiques de 1996, dont 1220 millions de francs pour les infrastructures et 550 millions pour l’acquisition de 40 rames simples de tramway. Le coût d’infrastructure comprend notamment l’aménagement des correspondances et les protections phoniques. Sur les Maréchaux, en revanche, le coût total d’investissement est de 2103 millions de francs H.T, dont 1813 millions de francs pour les infrastructures et 290 millions de francs pour l’achat des 21 rames simples de tramway ;

* Le tramway sur la Petite Ceinture ferroviaire offrirait des correspondances avec cinq (et à terme six) lignes de métro et avec deux lignes de RER. Il s’agit des lignes 4, 7, 8, 12, 13, B, C ainsi que Météor (ligne 14) lorsque cette ligne atteindra Maison Blanche. Dans l’état actuel des choses, le tramway sur les Maréchaux serait en correspondance avec toutes ces lignes à l’exception de Météor. Enfin, le temps de correspondance moyen avec le métro et le RER est le même dans les deux variantes ,en l’occurrence 2 minutes 20 secondes !

Enfin, nous souhaitons mettre fin à une idée reçue : la mise en place d’un tramway sur la Petite Ceinture ferroviaire générerait des nuisances sonores inacceptables pour les riverains. Voici un extrait du rapport officiel pré-cité (page 10) :

" Les calculs prévisionnels effectués pour une cinquantaine de points représentatifs indiquent que le niveau sonore est partout inférieur aux normes admissibles, de jour comme de nuit (en se basant sur le projet d’arrêté d’application du décret n° 95-22 du 9 janvier 1995).

Cependant, dans quelques zones calmes (rues de Cadix, Pierre Mille et Brançion dans le XV^e arrondissement, rue Gandon dans le XIII^e), la contribution du tramway dépasse le niveau sonore ambiant préexistant ( de 0.5 à 3.5 dB(A) ), mais reste inférieure à la limite admissible à ces endroits.

Pour ces zones et quelques autres, des protections phoniques sont prévues ; une étude fine permettra d’en déterminer la nature : ce pourrait être, selon les cas, des merlons de terre, des écrans absorbants bas, des écrans absorbants hauts (pour les sections en tranchée ouverte), ou encore des écrans encageant (c’est ce dernier dispositif qui semble le plus efficace). L’efficacité de ces dispositifs sera renforcée par des écrans absorbants d’entrevoie. Avec ces aménagements, les calculs prévisionnels montrent que la contribution du tramway est au plus de l’ordre de l’ambiance sonore préexistante.« En conclusion, alors que le Gouvernement et les dirigeants de l’Union Européenne souhaitent relancer le transport ferroviaire afin de limiter l’aggravation de l’effet de serre, que le Commissariat au Plan demande la réouverture des voies ferrées existantes, on ne peut que s’interroger sur les orientations actuelles des Pouvoirs Publics . Pourquoi vouloir à tout prix installer un tramway sur les Maréchaux alors que, comme le disait en son temps... Jean Tibéri, le 25 novembre 1996, dans sa » Communication sur les déplacements «  : »Sur la Petite Ceinture ferroviaire, la ligne de tramway serait placée en site propre sur l’ancienne plateforme ferroviaire aujourd’hui sans utilisation, clairement séparée de l’espace public. Elle serait plus rapide et plus fréquentée [qu’un tramway sur les boulevards des maréchaux] et assurerait de meilleures liaisons à ses extrémités avec le tram Val de Seine et Météor. Un traitement paysager pourrait créer, sur une bonne partie du parcours, une sorte de « tramway dans un jardin ». ?

En conséquence, nous appelons les élus soucieux d’un usage optimal de l’argent public à faire le choix d’une ligne de transport à la fois plus efficace et moins coûteuse : la ligne SNCF/RFF de Petite Ceinture. Et c’est pourquoi nous demandons aux Parisiens d’interpeller leurs élus actuels et tous les candidats aux prochaines élections municipales afin qu’ils s’engagent en faveur de la réouverture de cette ligne au plus tôt. Il en va de l’intérêt public.