Réaction à l’article du Parisien du samedi 17 juin 2006 évoquant un vélo-rail sur la Petite Ceinture

, par Association Sauvegarde Petite Ceinture (ASPCRF)

Le quotidien Le Parisien, dans son édition de Paris du samedi 17 juin 2006, page IV, évoque les projets d’aménagements de la Ville de Paris sur la Petite Ceinture ferroviaire, suite à la signature d’un protocole d’accord avec Réseau Ferré de France, propriétaire de la Petite Ceinture. On peut y lire que « Parmi les attractions phares de cette nouvelle promenade plantée, le vélo-rail circulera dès 2007 :

  • Entre le quai André Citroën (15e) et la place de Rungis (13e),
  • Entre la rue du Château des Rentiers et les voies de la gare d’Austerlitz à Masséna (13e),
  • Entre la porte de Charenton (12e) et la rue de Bagnolet (20e). »

Mais cette vision idyllique d’une coulée verte continue dans les 15e, 14e et 13e arrondissements entre le quai André Citroën (15e) et la place de Rungis (13e), est brisée par la confirmation, dans l’encart qui accompagne cet article, que les tunnels seront fermés au public (NDLR : pour des raisons de sécurité imposées par les sapeurs-pompiers). Ce qui réduit substantiellement le parcours envisagé sur la section Sud de la Petite Ceinture à quatre tronçons :

  • Un tronçon compris entre la place Balard et la rue de Vaugirard,
  • Un tronçon compris entre le parc Georges Brassens et la rue Jacques Baudry,
  • Un tronçon compris entre la rue Didot et la rue Friant,
  • Un tronçon compris entre la rue du Château des Rentiers et les voies de la gare d’Austerlitz.

Ainsi, nous assistons à la mise en place du découpage de la section Sud en une suite de squares indépendants car séparés les uns des autres par de longs tunnels (jusqu’à 900 mètres pour le tunnel de Montsouris).

Par ailleurs, monsieur Yves Contassot, adjoint au Maire de Paris chargé de l’environnement, de la propreté, des espaces verts et du traitement des déchets, déclare dans cet article que « ce pédalo sur rail risque même d’être pris d’assaut ». Nous lui rappelons que les trains spéciaux que nous avons fait circuler en 1999, en 2000 et en 2003 furent déjà pris d’assaut, rencontrant un grand succès populaire, bien loin de l’image de « ferrovipathes » ou de « nostalgiques du rail » que certains évoquent. Avec une capacité de transport bien supérieure à celle d’un vélorail, c’est à dire permettant de faire découvrir la Petite Ceinture à un plus grand nombre de personnes. Or voilà une opportunité de découverte de la Petite Ceinture qui malheureusement ne figure pas dans les projets présentés jusqu’à présent par la Ville de Paris.

Cliché : Vincent Joly Tous droits réservés.
Au retour, le train s’approche de la rue d’Avron (20e) en direction vers la gare du Nord.

Mais le plus intéressant dans la position de la Ville de Paris, exprimée par Monsieur Contassot, est la brusque disparition dans sa présentation de ces aménagements des objections couramment avancées pour décliner la possibilité d’un usage ferroviaire de la Petite Ceinture, comme ce fût le cas lors des concertations et de l’enquête publique concernant le prolongement de la ligne de tramway T2 jusqu’à la porte de Versailles : manque d’accessibilité, existence de nuisances sonores et visuelles pour les riverains, réactions potentiellement négatives de ces derniers. Ce qui est vrai pour un usage ferroviaire de la Petite Ceinture ne le serait plus pour une coulée verte où circulerait un vélo-rail, alors que ces questions interviennent quelque soit le projet et les solutions pour les minimiser mériteraient d’être débattues.

Outre cette question, le débat sur l’avenir ferroviaire de la Petite Ceinture rencontre depuis une dizaine d’années deux autres obstacles :

  • L’opposition souvent présentée entre un projet de transport ferroviaire et un projet de jardins sur la Petite Ceinture, alors qu’il existe une réelle complémentarité entre les deux. Complémentarité que notre association défend depuis 1993 et dont le jardin de la rue Ernest Roche, ouvert récemment dans le 17e arrondissement, est un excellent exemple.
  • Le souhait émis par des élus comme monsieur Contassot de dédier entièrement la voie ferrée de la Petite Ceinture à la réalisation d’une promenade plantée, évinçant ainsi toute possibilité de réutilisation ferroviaire. À une époque où la voie ferrée est de plus en plus reconnue comme un mode de transport écologique efficace comme alternative au transport routier, tant d’un point de vue énergétique qu’en rapport avec le niveau de pollution produit, l’unique usage défendu par ces élus d’une voie ferrée permettant des trajets de rocade en plein coeur de l’agglomération francilienne est de la tranformer en une suite de squares. Si nous reconnaissons que l’objectif d’augmenter la surface d’espaces verts à Paris est louable et pertinent, nous sommes très surpris qu’une voie ferrée présentant une grande utilité comme mode de transport alternatif à la route soit choisie pour réaliser des espaces verts. De même que peindre une HLM en vert ne change pas grand chose dans le quotidien des habitants, promettre du gazon dans des tunnels et des gadgets médiatiques pour amuser la foule ne constitue en fait qu’un cache-misère devant une absence de projet ambitieux, réellement écologique et utile.

Par conséquent, nous interviendrons dans le cadre de cette concertation pour défendre le projet de « tramway dans un jardin », ce que nous promouvons depuis plusieurs années, comme défenseurs de l’intérêt public comme de l’écologie intelligente.

Enfin, dans cet article du Parisien, il est dit que la Petite Ceinture sera « rendue aux Parisiens » : ce raccourci journalistique est assez cocasse. Ceux qui connaissent réellement ce sujet savent bien que dès sa création, la Petite Ceinture était exploitée par et pour les exploitants ferroviaires (et son emplacement était alors « hors les murs »). Depuis, elle n’a jamais changé de vocation. En 1900, 34 millions de Franciliens (ce terme n’existait pas encore à l’époque) l’ont empruntée avant que le trafic voyageur ne décline puis soit finalement transféré à la ligne de bus PC en 1934. Il ne peut s’agir de « rendre » aux Parisiens ce qui ne leur a jamais appartenu. En revanche, offrir (un verbe que nous préférons) la possibilité aux Parisiens et aux Franciliens un moyen de transport fiable, rapide, performant et écologique nous paraît un projet digne d’intéresser des représentants du peuple ayant une ambition d’avenir. Qui pourrait donc avoir cette ambition ?