La Petite Ceinture, trait d’union entre les portes de Paris et la petite couronne

, par Association Sauvegarde Petite Ceinture (ASPCRF)

La Petite Ceinture serait-elle « une fracture à résorber dans le paysage parisien » ? C’est en tout cas ce qu’affirme un récent article, publié sur le site Ecologikmagazine.

Notre association, qui défend depuis plus de 25 ans l’A.D.N. ferroviaire de la Petite Ceinture, tient à apporter une réponse claire quant à ces allégations.

Loin de marquer une frontière entre les différents territoires de la capitale, la Petite Ceinture est au contraire une formidable opportunité de transports pour Paris et sa région.

 La Petite Ceinture, une « fracture dans le territoire urbain » ?

Régulièrement, des articles fleurissent sur Internet à propos de la Petite Ceinture, où l’on apprend que cette ligne serait « abandonnée depuis 1934 », un espace où la nature « aurait depuis longtemps repris ses droits », etc..

Tel un poisson d’avril arrivé avec un peu d’avance, un article publié le 26 mars 2020 par Ecologikmagazine nous apprend que la Petite Ceinture « contribue aujourd’hui à fractionner le territoire métropolitain » en créant « une limite psychologique », selon Concetta Sangrigoli, architecte urbaniste mandatée par la Mairie de Paris pour étudier les aménagements de la Petite Ceinture.

Et cette dernière de conclure qu’il faudrait de toute urgence « réinvestir [la Petite Ceinture] pour réconcilier les quartiers qu’elle longe de part et d’autre ».
Autant d’approximations et d’inexactitude qui n’ont pas manqué de faire réagir notre association.

 La Petite Ceinture, une opportunité de transports unique pour Paris et sa région

Concédons un point à cet article : la Petite Ceinture a effectivement été inaugurée au début de la seconde moitié du XIXe siècle (à partir de 1852 pour être précis).

Et elle a bel et bien été délaissée au profit du Métropolitain à partir des années 1900 – non pas en raison de son inadéquation aux besoins des Parisiens, mais à cause de la concurrence du métro et aussi (et surtout) à cause de l’immobilisme du Syndicat de Ceinture, en charge de la gestion de la P.C. jusqu’en 1934.

Mais, contrairement à ce qu’affirme cet article (et bien d’autres, sur la toile ou ailleurs…), la Petite Ceinture a connu jusque récemment un important trafic lié aux de marchandises et aux trains de jonction entre les différentes gares parisiennes, et ce jusqu’en 1993.

Voir à ce sujet notre dossier sur l’histoire de la Petite Ceinture.

Passage du train La Flèche d’Or sur la Petite Ceinture entre les gares de Paris-Lyon et de Paris-Nord
Le 4 avril 1974, la tranche Rome-Calais Maritime destinée au rapide 401 La Flèche d’Or quitte Paris-Lyon et s’engage en direction de Paris-Nord derrière la BB 63950. Cliché : Michel Joindot. Tous droits réservés.

Dans les années 2000, elle a été privée du retour d’un transport en commun, à la suite de la volonté de la Ville de Paris de réduire le trafic automobile sur les boulevards des Maréchaux grâce au T3, inauguré en 2006.

Dans le cadre du protocole-cadre signé en 2006 (et prorogé en 2015) par la SNCF et la Mairie de Paris, des aménagements ont vu le jour sur la plateforme. Comme stipulé dans ledit protocole, ces derniers doivent impérativement être réversibles et ne pas empêcher la circulation ferroviaire.

Devant la saturation des lignes T3a et T3b sur toute leur longueur [voir notre article] – sans parler des nombreux projets devant voir le jour aux différentes portes de Paris – la Petite Ceinture doit jouer un rôle de premier plan afin de permettre, à brève échéance, de transporter rapidement les Franciliens d’une porte de Paris à une autre. Étant établie en viaduc ou en tranchée, elle permettrait de faire circuler des rames en site propre et ne serait donc pas soumis aux aléas de la circulation automobile.

Elle viendrait également desservir des territoires « oubliés » par les le métro ou le tramway, à l’image du quartier des Buttes-Chaumont ou de celui situé au bas du cimetière du Père-Lachaise.

La Petite Ceinture à Porte de Vincennes
Crédits : Jean-Nicolas Lehec, tous droits réservés.

En employant un matériel roulant silencieux et performant, la Petite Ceinture ferroviaire de Paris pourrait devenir la vitrine d’une mobilité urbaine innovante, qui allierait vitesse, confort et respect de l’environnement. C’est d’ailleurs ce que notre Association préconise depuis plusieurs décennies avec ses partenaires, tant associatifs qu’institutionnels.

 Le Périphérique, la véritable fracture entre Paris et la petite couronne

Enfin, il paraît légèrement hasardeux de comparer la Petite Ceinture de Paris à une « ligne de fracture » alors qu’à quelques dizaines de mètres s’étend le ruban d’asphalte du Périphérique, qui vient imiter la Petite Ceinture, mais au profit de la voiture individuelle.

Depuis sa construction dans les années 1960, c’est bien cette autoroute urbaine qui a créé une véritable frontière entre le territoire de Paris et les communes de la petite couronne, établissant un fossé – voire une barrière psychologique, pour reprendre les termes de cet article – dans un espace qui aurait dû être totalement continu.

Représentant une source de nuisances considérables (bruit, pollution), le Périphérique est aussi devenue un marqueur social d’exclusion pour les populations vivant à proximité immédiate.

Le Périphérique parisien – ici à la Porte d’Orléans – véritable fracture urbaine
Crédits : Jean-Nicolas Lehec, tous droits réservés.

Alors que certaines villes, comme San Francisco, ont justement supprimé leurs autoroutes urbaines, certains candidats à la Mairie de Paris ont proposé (ou suggéré) la suppression du Périphérique. Renforcer les transports parisiens – et donc rouvrir la Petite Ceinture – proposerait un report modal efficace aux automobilistes.

Loin de représenter une cassure dans le tissu urbain, la Petite Ceinture vient au contraire le renforcer. Véritable trait d’union entre les différentes portes de Paris, elle s’impose naturellement comme une réelle solution de transport à l’échelle de la région Île-de-France et répond immédiatement aux besoins de celles et ceux qui ont recours aux transports en commun.